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Is This Dance?

Stan Briche

Peut-être l'interprète.

Il y a quelque chose de magique à découvrir une première pièce, encore plus lorsqu’il s’agit d’un solo. C’est un peu comme dire « j’y étais ». Et c’est souvent ce qui arrive au Point Ephémère, où sous l’impulsion généreuse et bienveillante de David Dibilio, bon nombre de jeunes chorégraphes présentent leurs premières productions, après avoir eu l’opportunité de travailler dans un studio, bien repéré aujourd’hui comme lieu d’émergence en danse contemporaine, et qui ose peut-être plus que d’autres. Stan Briche est de ceux-là. D’abord comédien, il a toujours frayé avec des projets alternatifs, hybrides, à la limite de la danse. Et le voilà qui se lance comme chorégraphe. Sa proposition pose une question toujours essentielle : qu’est-ce que la danse et qui peut le dire ? Convoquant des gestes, des mouvements de chanteuses pop qui ne sont pas danseuses et qui pourtant dansent sans le savoir, il questionne le statut de l’improvisation, du naturel. On le voit s’approprier ces gestes et mouvements, les incarner comme il l’a toujours fait dans sa vie d’interprète, on se dit qu’il nous mène en bateau, qu’il est facétieux, qu’il se moque un peu de nous, que tout ça n’est vraiment pas de la danse, trop léger, trop aléatoire, que c’est sans doute une performance oui, mais peut-être pas un spectacle. Et par un habile retournement, tout d’un coup il se met à reproduire exactement le même enchaînement que nous trouvions si léger il y a quelques minutes et qui cette fois tombe juste sur la partition du Boléro de Ravel, monument qui aura fait bien des chorégraphies, signalant ainsi que tout était écrit et réactivant l’interrogation malicieuse de Duchamp sur ce qui fait l’art : l’oeuvre ou l’oeil du regardeur ? L’oeuvre ou le musée ? Et qu’est-ce qui fait le chorégraphe ? Peut-être l’interprète.

Thomas Adam-Garnung

vu à :
Point Ephémère, Paris
photographie :
Stan Briche